Elle a été diffusée du printemps à l’été sur Showtime. 18 épisodes encore disponibles sur la VOD de Canal+ pour la France. Elle met toutes les séries à l’amende par la folie créative du duo qui se cache derrière elle et plus particulièrement du plus célèbre des deux, David Lynch. Elle est un ovni total, une histoire qui dure depuis 25 ans et vient de trouver une conclusion (?) à la hauteur du culte forgé dans les années 90. Elle, c’est la saison 3 de la série Twin Peaks, revenue donc un peu plus de 25 ans après la fin de la saison 2, en 1991. Ce quart de siècle d’attente n’est pas une coïncidence : c’est ce qu’avait annoncé l’un des personnages – j’ai failli dire qui ! – à l’agent Dale Cooper, dans une scène prémonitoire dingue, à l’image de la série.
Résumé des épisodes précédents : dans la petite ville de Twin Peaks, un corps a été découvert. C’est le cadavre de Laura Palmer, une jeune lycéenne sans histoire (vraiment ?), tendance “reine de promo”. Les deux premières saisons de Twin Peaks se présentent comme un polar. Il faut retrouver l’assassin de Laura et pour ça, le FBI a dépêché sur place l’agent Dale Cooper (Kyle MacLachlan). David Lynch oblige, l’histoire dévie rapidement de sa trajectoire : non seulement le fantastique s’invite dans le scénario – promis, on ne dit rien – mais surtout l’étude de moeurs prend le pas sur l’enquête. Car à Twin Peaks, rien n’est ce qu’il semble être et les habitants ont tous de bons gros secrets. Et ils sont loin de tourner rond. Les 29 épisodes qui composent l’ensemble sont inégaux – il y a un trou d’air dans la deuxième saison – mais le talent de David Lynch fait la différence. L’ambiance, les personnages, des scènes anodines qui prennent une ampleur folle, la mise en scène… Twin Peaks ne s’oublie pas comme ça.
Mais revenons à notre saison 3. La première de ses qualités tient en ce qu’elle arrive à restituer le style si particulier des anciennes saisons sans leur coller aux basques. L’action ne se déroule qu’en partie à Twin Peaks, très peu d’ailleurs. On retrouve d’anciens acteurs – dont Kyle MacLachlan dans un double numéro extraordinaire – mais de nouveaux apparaissent. La saison 3 se regarde comme un puzzle dont toutes les pièces s’assemblent petit à petit. Il ne faut pas (trop) chercher à comprendre. Fragmentation totale de l’histoire, éclatement mystique des scènes, de l’intrigue, de l’espace et du temps – à cet égard, le fameux épisode 8 est une oeuvre à part entière, une “expérience” sans équivalent à la TV. Comme si David Lynch faisait passer un message à toutes les séries actuelles remplies de vraies/fausses provocations : “derrière votre violence et vos scènes de sexe, tout ça est très calibré. Je vais vous montrer ce que c’est que d’être libre de partir en vrille”.
Et c’est réussi ! Par ses audaces et les inspirations démentielles de David Lynch et Mark Frost, la saison 3 de Twin Peaks atteint des sommets encore plus hauts que ceux des premières saisons. Ces 18 épisodes sont uniques. Les acteurs sont brillants, autour d’un Kyle MacLachlan extraordinaire (oui, je l’ai déjà dit). Vous pensez avoir tout vu à la TV, rencontré toutes les folies ? Essayez donc Twin Peaks S3. Mais avant, si vous ne l’avez pas déjà vu, regardez le film Twin Peaks : Fire Walk with Me, sorti en 1992 et qui sert de préquel aux premières saisons. Déjà parce qu’il est génial, et parce qu’avec David Lynch, même si on ne comprend pas tout, lui sait où il va. Encore que…